Que faire avec l’indicateur « No Fly » ?

Quand nous partons en voyage dans des contrées lointaines ou exotiques en emportant notre matériel de plongée dans le but d’effectuer soit une croisière, soit un stage , ou encore juste quelques plongées, notre ordinateur de plongée fait bien entendu partie du paquetage. Au moment de faire les valises pour rentrer au domicile, nous sommes nombreux à le consulter pour prendre connaissance de l’indication d’interdiction de prendre l’avion ou pas. Ayant récemment offert un ordinateur « Shearwater Peregrine » à S. (ma binôme préférée), j’ai pu constater que ce modèle (situé dans le moyen / haut de gamme) ne proposait pas d’afficher cet indicateur. J’ai donc eu l’idée d’écrire ce billet pour proposer une démarche « de bon sens ». On peut bien entendu ne pas être d’accord avec ce que je vais vous proposer !

Quand nous plongeons, l’azote contenu dans le mélange respiré se dissout progressivement dans notre organisme selon un processus complexe. En faisant surface, nous avons donc un « stock » d’azote résiduel dissous dans notre corps. Ce stock va s’évacuer graduellement avec le temps. On considérait avec les bonnes vieilles tables MN90 qu’au bout de 12 heures après une plongée, on avait évacué l’ensemble de l’azote résiduel. Si on faisait 2 plongées dans la journée, on calculait « la charge d’azote résiduel » et on en déduisait les éventuels paliers de désaturation (12 heures après cette deuxième plongée, on considérait avoir évacué l’ensemble de l’azote). C’est aussi pourquoi le mode d’emploi des ces tables préconisait aussi de faire une pause d’une journée au bout de 6 jours d’immersion consécutives, non pas pour sacrifier à un quelconque culte, mais bien pour être sûr de se débarrasser de ce gaz dissous « encombrant » (même si aujourd’hui cet outil de décompression, que sont les Tables MN90, est complètement dépassé, je ne peux que conseiller aux plongeurs autonomes, et aux guides de palanquée de le lire pour leur culture personnelle, et progresser dans leur compréhension de la décompression).

En clair, avec de l’azote dissous dans le corps, la désaturation se poursuit en surface. Aussi, si on part immédiatement après une plongée faire une balade en altitude, ou si on prend l’avion peu de temps après, on risque de s’exposer à un accident de désaturation. La désaturation est un processus physiologique complexe, il varie selon l’individu, ainsi que selon sa forme physique (poids, fatigue, …) et mentale (stress, état d’esprit, …). Il est donc quasi impossible d’écrire autre chose que des recommandations de bon sens. Pour illustrer mon propos, et purement à titre d’anecdote, je me souviens de vacances passées dans le sud de la France avec S. et mon ami C. Nous plongions depuis plusieurs jours à Fréjus, notamment sur le Cap du Dramont. Un matin, nous avons effectué une plongée à 50 mètres, fait nos paliers comme nous le devions, et sommes partis l’après-midi en promenade dans l’arrière-pays varois, du côté de Mons (altitude 800 mètres environ). Alors que nous admirions le panorama depuis la table d’orientation indiquant l’altitude du lieu, C., S. et moi nous avons échangé un bref regard et nous nous sommes questionnés mutuellement, à savoir si nous allions bien, et si nous n’avions pas de démangeaisons. Rien de tout cela dans nos états respectifs, mais nous sommes vite rentrés sur la côte… plus un mot n’avait été échangé dans la voiture, personne n’était très fier d’avoir manqué de la élémentaire vigilance ! Fort heureusement, nous n’avons pas déclaré ensuite d’ADD, mais cela nous a bien servi de leçon !

Beaucoup d’ordinateurs de plongée affichent un petit logo représentant un avion symbolisant une interdiction de vol (« No Fly »). L’apparition de cet affichage diffère bien évidemment selon le fabricant et le modèle d’ordinateur. Ainsi certains ordinateurs vont être très conservateurs (No Fly pendant 48h00 après une plongée avec un palier obligatoire), la plupart proposent une interdiction de vol pendant 24h00 tant que la désaturation n’est pas terminée, enfin des modèles évolués indiquent un temps d’interdiction restant en heures et minutes (ce temps intégrant l’usage de plongées au Nitrox). J’ai trouvé sur internet un document intéressant produit par la Commission Technique Régionale AURA (Auvergne Rhône-Alpes) de la FFESSM présentant les fonctionnalités de différents ordinateurs, avec notamment la gestion du « No-Fly ».

À ma connaissance, seule la marque Shearwater ne propose pas d’affichage de ce type, considérant que le temps d’interdiction de vol n’est pas le résultat d’un calcul issu d’un modèle mathématique. Aussi dans le but de responsabiliser ses utilisateurs, ce constructeur ne fait pas de recommandations qui pourraient être mises en défaut, et et conseille de suivre les recommandations du « Divers Alert Network » (DAN) qui, pour mémoire, sont les suivantes :

  • Pour une seule plongée sans décompression, il est conseillé d’observer un délai minimum de 12 heures avant le vol.
  • Pour plusieurs plongées par jour ou plusieurs jours de plongée, il est conseillé d’observer un délai minimum de 18 heures avant le vol.
  • Pour les plongées nécessitant des paliers de décompression, il existe peu de preuves sur lesquelles fonder une recommandation et de ce fait, il est conseillé d’observer un délai nettement supérieur à 18 heures avant de prendre l’avion. Donc une pause de 24 heures semble indiquée.

Je vous conseille donc la lecture de cet article écrit par Bruce Partridge, qui n’est autre que le fondateur de l’entreprise Shearwater.

Donc de mon point de vue, cette indication d’interdiction de vol proposée par les ordinateurs est une bon indicateur, mais ce n’est pas parce que votre ordinateur ne vous l’affiche plus qu’il faut s’en remettre uniquement à lui. Il faut faire preuve de bon sens et de prudence, et surtout de restez vigilant.

Voici donc quelques recommandations pour limiter les risques avant prendre l’avion :

  • Pendant votre séjour, plongez au Nitrox, notamment lors de sorties plongée de plusieurs jours consécutifs.
  • Hydratez-vous régulièrement avant, et après les
  • Respectez a minima l’indication « No-Fly » de votre ordinateur (tout au moins si il en est doté)
  • Ne tombez pas dans le piège de faire la plongée la plus profonde la veille du départ
  • Évitez de faire la fiesta la veille du départ
  • Appliquez un délai d’au moins 18 heures avant d’embarquer et si vous voulez maximiser votre sécurité, appliquez strictement la règle des 24 heures, quitte à ne pas faire la dernière plongée du séjour (j’ai toujours coutume de dire « Il vaut mieux ne pas plonger que ne plus plonger »).
  • Dans l’avion, bougez régulièrement pour activer la circulation du sang et favoriser les échanges gazeux

Et vous, à quelles règles vous astreignez-vous avant de prendre l’avion suite à une sortie plongée ? Merci par avance pour vos retours !

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