Pour bien plonger, vous plongez en équipe ou en palanquée ?

Vous l’aurez bien compris, derrière ce titre un peu provocateur, je vous propose une petite réflexion sur le comportement de chacun d’entre nous lorsque nous nous immergeons et que nous allons explorer les beautés du monde sous-marin. Règlementairement, une palanquée est « constituée de plusieurs plongeurs qui effectuent ensemble une plongée présentant les mêmes caractéristiques de durée, de profondeur et de trajet« . Le législateur n’a rien écrit sur le savoir-être de chacun des membres de la palanquée, que ce soit en termes d’attention à l’autre, d’entraide, et de bienveillance. Le but de ce billet est donc de tenter d’enrichir votre vision pour que demain, vous ne soyez plus simplement qu’un membre d’une palanquée, mais bien un équipier actif qui participe et contribue à la réussite d’une belle plongée.

Je connais beaucoup de plongeurs qui pensent à leur sécurité en plongée (et c’est très bien !) en gérant de la redondance (par exemple avec un deuxième ordinateur au poignet au cas où le principal tombe en panne pendant l’immersion). Cette attitude est bénéfique, mais pas suffisante pour garantir la sécurité globale. Ces mêmes plongeurs considèrent souvent le ou les binômes comme une simple « assurance » en cas de problème. Pourtant la sécurité d’une palanquée n’est pas garantie par la coexistence de savoir-faire individuels, mais bien par la cohésion (qui doit cultivée activement) d’une équipe, avec des compétences interpersonnelles. Cette cohésion se développe par une bonne communication, une planification claire, une confiance mutuelle, et une adaptabilité pour faire face aux imprévus.

Coordination

Avant la plongée : bien se coordonner

Une palanquée efficiente (qu’elle soit encadrée ou qu’elle soit autonome) se prépare ensemble : après avoir écouté attentivement le briefing du Directeur de Plongée, les équipiers se briefent eux-mêmes sur la mise à l’eau, l’immersion, le « Bubble Check » à trois mètres, le parcours au fond, les conditions de fin de plongée, la phase de remontée, l’éventuel envoi du parachute et le retour au bateau. Ainsi les objectifs de l’exploration sont bien compris et partagés, et les rôles sont bien définis. Cela inclut la planification des procédures d’urgence, la répartition des tâches, le détail du « run-time » et la compréhension mutuelle des limites individuelles (chacun les exprime sans tabou ni retenue, et tous les comprennent et les respectent).

Signe OK

Sous l’eau : bien communiquer

En plongée, les signaux manuels ne suffisent pas toujours. Il faut développer une communication fluide, aussi bien non verbale qu’écrite, anticiper les besoins du binôme, et maintenir une conscience partagée de la situation. Ainsi je ne saurais que trop recommander de se doter d’une tablette de notation pour faciliter les échanges entre membres de la palanquée. J’aime bien ce modèle en photo sur la droite plutôt que ceux sous forme d’ardoise (qui pendouillent en général, accrochés qu’ils sont à un anneau de la stab). Par ailleurs, il est de bon ton de se mettre d’accord sur des signes non conventionnels qui peuvent être très utiles comme :

Ardoise de poignet
  • « Sais-tu où se trouve le bateau ? » : Les mains jointes forment un « V » pour symboliser la coque de l’embarcation.
  • « Il me reste 5′ avant le NoDecTime=0 » : L’index et le majeur tapotent 2 fois l’écran de l’ordinateur.
  • « Je vais envoyer le parachute » : Le poing fermé est agité 3 fois de haut en bas pour symboliser la traction sur le bout du parachute.
Confiance

Sous l’eau : se sentir en confiance

La confiance ne se décrète pas : elle se développe par l’expérience commune, la transparence et la fiabilité. Ainsi, un guide de palanquée devra inspirer la confiance envers les plongeurs et les plongeurs qu’il ou elle va encadrer, Il devra clairement expliquer la façon dont l’immersion va se dérouler, et respecter ses propres consignes. Pour une palanquée autonome, une équipe qui se connaît bien sera plus apte à gérer les imprévus sans stress excessif, et une équipe qui ne se connaît pas devra renforcer l’étape de coordination dont j’ai parlé plus haut. Je peux résumer tout cela ainsi : « Dire ce que l’on va faire, et faire ce que l’on a dit » (le fameux « Plan your dive and dive your plan » de nos amis anglo-saxons).

Adaptabilité

En cas d’imprévu : faire preuve d’adaptabilité

Les meilleures équipes ne sont pas celles qui suivent le planning prévu à la lettre, mais celles qui savent s’adapter ensemble aux imprévus. C’est ce que les plongeurs « Tek » appellent la gestion des « What if…? ». Ainsi par exemple, si un détendeur se met à fuser lors d’une plongée en eau froide, les équipiers sauront réagir sans paniquer et gérer la situation sans précipitation, et sans paniquer, en appliquant la procédure idoine. Malgré tout, ce genre de comportement ne s’acquiert qu’avec de la pratique et de l’expérience, et des recyclages réguliers (je vois trop souvent des plongeurs Niveau 2 ou Niveau 3 qui n’ont jamais pratiqué la moindre plongée technique de remise à niveau depuis l’obtention de leur diplôme). Cette adaptabilité, attendue face à l’imprévu, implique donc de reconnaître les signaux faibles, de réévaluer les priorités et de prendre des décisions collectives en temps réel.

Coordination

Après la plongée : ne pas négliger le débriefing

Après la plongée, il ne suffit pas de se taper dans le dos en se félicitant et en se rappelant les beaux spécimens que l’on a pu observer. Il faut toujours prendre un petit temps de débriefing ensemble pour analyser et partager ses sensations, et ce que l’on a pu observer chez les partenaires de la palanquée. Un Guide de Palanquée doit le faire systématiquement avec les plongeurs qu’il encadre (afin de les faire profiter de son expérience, et par là même, de les faire progresser dans leur pratique), une palanquée autonome devra faire de même pour partager les difficultés rencontrées, en toute humilité et sans tabou. J’ai coutume de dire que on apprend toujours à chaque plongée, mais après sa « x-millième » immersion ! Comme on vérifie systématiquement son lestage juste avant l’immersion, il est bon de revenir sur ce point pour partager avec les copains et les copines le fait de savoir si on s’est senti sur ou sous-lesté !

Conclusion

En conclusion…

Je n’écris pas ce billet pour donner des leçons mais bien pour inciter les plongeurs et les plongeuses à ne pas considérer les partenaires de palanquée comme de simples auxiliaires de sécurité, mais bien comme des équipiers actifs, responsables et fiables, grâce à qui on va pouvoir profiter pleinement d’une plongée réussie. Cette attitude ne s’apprend pas, elle se cultive à chaque immersion, au travers de compétences humaines de savoir-être, d’une préparation rigoureuse de la plongée, ainsi que le développement d’une culture de la collaboration et de l’humilité.

Et vous, avez-vous l’habitude de développer cette attitude collaborative et inclusive ? Merci par avance pour vos retours !

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