L’examen N4 FFESSM Version 3.2 : Du changement dans la continuité !

Depuis le 10 Juin 2013, Le diplôme FFESSM de Guide Palanquée – Niveau 4 a subi de nombreuses évolutions, voulues pour certaines, et subies pour d’autres. Force est de constater que les modifications apportées se succèdent et tendent à montrer une « instabilité » dans le contenu des épreuves. Le 20 Février 2018, la Commission Technique Nationale (CTN) a publié une nouvelle version des épreuves composant l’examen de Guide de Palanquée. L’idée de ce billet est donc de faire le point sur toutes les évolutions effectives depuis la « Grande Réforme » de 2013, et de détailler les nouveautés portées par cette nouvelle version. Enfin, et sans remettre en cause mon devoir de réserve, en tant que Moniteur Fédéral FFESSM, je porterai un commentaire personnel sur ces évolutions à répétition (dans un esprit bienveillant, il va de soi).

J’ai tenté de dresser la « Timeline » (pardon pour cet anglicisme) des évolutions du diplôme, et je suis arrivé à la présentation suivante :

historique évolutions N4

On se rend compte sur ce diagramme, que pas moins de 5 versions de l’examen se sont succédées en un peu moins de cinq années. Cela illustre aussi un mode « réactif » de ma fédération sur des événements exogènes et met en évidence un débat interne indéniable sur l’avenir, le maintien ou pas, de la tant controversée « Remontée Sans Embout ». Si je retrace rapidement les contenus des différentes versions, voici ce qu’elles contenaient (en considérant que le « Niveau 4 Capacitaire » était en quelque sorte la Version 1.0) :

  • Version 2.0 : Mise en place le 10 Juin 2013, elle constitue une rupture par l’introduction d’une vraie épreuve de conduite de palanquée (Briefing, Plongée, Débriefing). Elle instaure aussi un tirage au sort entre l’épreuve du 800 m PMT et du 500 m Capelé individuel chronométré.
  • Version 2.1 : Installée de fait le 1er Juillet 2015, après 2 ans d’existence du nouveau diplôme, et à la suite d’un malheureux accident. L’épreuve de RSE est suspendue, chaque stagiaire se voit attribuer une note de 10/20 à l’épreuve afin de la neutraliser. L’examen se retrouve de fait déséquilibré car l’obtention du diplôme, ou tout au moins de la partie « scaphandre » est dépendant de seulement deux épreuves.
  • Version 3.0 : La modification prend lieu le 21 Mai 2016, un peu plus de 10 mois après la suspension. Elle met en place la nouvelle épreuve de RSE (Remontée Sans Embout de 25 à 10 mètres), supprime le tirage en sort entre le 800 m et le Capelé pour instaurer une nouvelle épreuve, le Capelé en palanquée, non chronométré.
  • Version 3.1 : Installée là encore de fait, à la suite d’un  nouvel accident, le 17/09/2017. La RSE est de nouveau suspendue, et l’examen s’en est trouvé de nouveau déséquilibré. Chaque stagiaire se voit attribuer une note de 10/20 sur cette épreuve.
  • Version 3.2 : Publiée le 20 Février 2018, elle entérine la suspension de la RSE, mais pour rééquilibrer l’examen, fait apparaître la nouvelle épreuve de DTMR (Démonstration technique de Maîtrise de la Remontée gilet), et réinstaure le côté individuel chronométré du 500 mètres capelé (avec un temps maximum de 16 minutes).

On constate donc qu’en 56 mois, les stagiaires n’ont quasi jamais passé le même examen pour obtenir les mêmes prérogatives, de même les moniteurs ont dû adapter leur enseignement à quasiment chaque saison de formation, et ont souvent été confrontés à devoir enseigner un geste technique qu’ils avaient eux-mêmes très peu pratiqué (je tire ce constat de mon expérience personnelle et des échanges que j’ai pu avoir avec d’autres copains moniteurs). Au total, 24 mois s’écoulent entre la publication de la version 2.0 et la version 2.1, 11 mois entre la Version 2.1 et la version 3.0, 16 mois entre la version 3.0 et la version 3.1, et enfin 5 mois entre la version 3.1 et la version 3.2 (la version actuelle).

La version actuelle fait apparaître les évolutions suivantes :

  1. Ajout de l’aptitude (A3) à présenter l’épreuve de DTMR : La Démonstration Technique de Maîtrise de la Remontée devra avoir été correctement  effectuée pendant la formation et le stage final pour pouvoir se présenter à l’examen de Guide de Palanquée. Cela va dans le bon sens, une épreuve doit avoir été travaillée avant l’examen.
  2. Ajout de l’aptitude (A5) à présenter les épreuves de nage PMT et capelé : Cette aptitude est nouvelle, et est ajoutée, je pense, suite à des examens ou des candidats se sont présentés hors de forme et incapables de réaliser dans des temps non éliminatoires ces 2 épreuves (de plus ce ne sont pas des barèmes olympiques !).
  3. Dédoublement de l’épreuve 8 en 8A (DTMR) et 8B (RSE) :Pour pouvoir légalement introduire l’épreuve de Démonstration Technique de Maîtrise de la Remontée (DTMR), il faut modifier l’épreuve 8 et mettre en place le tirage au sort entre elle et la RSE de 25 mètres.
  4. Détail de la nouvelle épreuve DTMR : Cette nouvelle épreuve est composée de deux phases consécutives mais totalement distinctes : une phase de remontée assistée, et une phase d’envoi du parachute. Elle vise à évaluer la capacité de réagir correctement face à une situation dégradée. La première phase évalue une remontée assistée depuis 25 mètres de profondeur où le stagiaire assure une remontée régulière, à la bonne vitesse d’un plongeur en panne d’air (il lui aura donc présenté et donné son octopus. L’assisté ne gère pas sa remontée et se contente de respirer sur l’octopus de son « sauveteur ». Il est proscrit de regonfler le gilet de l’assisté (et pour cause, il est sensé ne plus avoir d’air dans son bloc), et le stagiaire n’aura le droit que de regonfler 2 fois au maximum son propre gilet. L’arrêt devra se faire entre 5 et 3 mètres et devra être franc. Au signe « Fin d’exercice » du moniteur, la phase 1 se termine, et la phase 2 commence immédiatement. La palanquée redescend alors à une profondeur maximum de 8 mètres, et le stagiaire effectue une démonstration d’envoi de son parachute, en utilisant son octopus pour le gonfler (sont évalués la stabilité pendant la phase d’envoi, la rapidité . Il gère alors la décompression de la palanquée pour respecter les paliers obligatoires (si aucun palier n’est nécessaire, un palier de principe de 1 minute à 3 mètres sera effectué afin d’évaluer le candidat). À la fin du palier, dès le retour en surface, l’épreuve prend fin.
  5. Détail de la modification de l’épreuve de capelé : L’épreuve redevient individuelle (!), s’effectue avec le scaphandre sur le dos, bouteille ouverte, détendeur principal en main, et le stagiaire peut gonfler son gilet à sa convenance. Elle est notée « Faite » ou « non Faite ». Le temps éliminatoire est de 16 minutes (soit 3 minutes de plus que dans la version historique du Niveau 4 Capacitaire), j’interprète que cela est certainement dû au vieillissement de la population qui se présente à l’examen.

Attention, même si l’épreuve 8 est dédoublée entre deux épreuves 8A (DTMR) et 8B (RSE) qui normalement sont tirées au sort, la suspension effective de l’épreuve de RSE fait que seule l’épreuve 8A sera à réaliser à l’examen. De même la signature par un MF1 de l’aptitude A4, ne sera pas exigée pour qu’un stagiaire puisse se présenter à l’examen, toujours du fait de cette suspension.

Loin de moi toute idée de polémique, en effet, il est important, de mon point de vue, que l’examen de Guide de Palanquée permette à un stagiaire de démontrer de réelles compétences d’encadrement, d’assistance, de sauvetage, et d’aisance. Aussi voir une épreuve alternative à la RSE être mise en place ne peut qu’aller dans le bon sens. Cependant, ces multiples atermoiements et aller-retours ne tendent pas à montrer une grande stabilité et unité au sein du collège des instructeurs. Au contraire, je trouve que cela met au jour des tiraillements entre « anciens » et « modernes », si tant est que cette expression puisse s’appliquer. De plus, il ne faut pas être grand clerc pour savoir que cette suspension n’est que provisoire, et que, tôt ou tard, une posture, que j’espère définitive, sera prise par la fédération, et qui sera soit la disparition définitive de l’épreuve de RSE, soit son rétablissement de plein droit. Nous aurons donc dans quelques semaines ou quelques mois une version 3.3 de l’examen de Guide de Palanquée. Peut-être la Démonstration Technique avec Handicap (DTH alias le sauvetage palme de 20 mètres de fond) ressortira-t-elle des cartons ? 🙂

Je constate deux choses de ma petite fenêtre : d’une part les stagiaires potentiellement intéressés pour passer le Niveau 4, sont déboussolés et « inquiets » de voir un contenu pédagogique évoluer sans cesse, d’autre part, nombre de moniteurs sont démotivés pour contribuer à former des plongeurs Niveau 4, car ils sont eux-mêmes en perte de repères (en effet, pour bien enseigner une épreuve, il faut l’avoir réalisé plusieurs fois et la maîtriser, si la DTMR ne présente pas de difficulté intrinsèque, l’enseigner avec une bonne progression et la faire réaliser en simulation d’examen, puis en simulation d’examen est une autre histoire, cela était déjà le cas avec la RSE nouvelle formule), et malgré tous les MF1 formés chaque année, on retrouve toujours les mêmes visages chaque saison… Enseigner le Niveau 4 ferait-il peur aux jeunes moniteurs ?

Je contribue cette saison encore, au sein de mon Comité Départemental, à la formation Guide de Palanquée, et j’attends avec impatience une stabilisation du Manuel de Formation Technique, car se former à enseigner une épreuve ou un geste technique, cela prend du temps, qui vient s’ajouter au temps passé à former effectivement des plongeurs… dans une vie de bénévole, cela représente un investissement non négligeable.

J’attends vos commentaires avec intérêt, mais s’il vous plaît, parlons sur le fond et évitons le débat mille fois déjà fait de « Pour ou contre la RSE »  ! Merci d’avance pour vos retours !

 

 

10 réflexions au sujet de “L’examen N4 FFESSM Version 3.2 : Du changement dans la continuité !”

  1. Bonjour, moi qui me prépare à passer mon N4 cette année, je travaillerai dur et m’adapterai à l’examen pensé par « les grandes instances fédérales !!! » Ceci dit ce n’est pas facile de trouver dans mon secteur (83 Sainte Maxime) un club qui organise le stage/examen en hors saison ….
    Jean Benoit

    • Tu sais Jean-Benoît, c’est compliqué partout ! tu peux consulter le calendrier fédéral de ta région pour avoir les dates

  2. Merci Phil pour ces précisions. Difficile en effet de suivre quand on est éloigné de la Fédé : ton article fait donc du bien.
    Pour ma part j’ai même des difficultés à m’y retrouver dans tous les sigles utilisés aujourd’hui pour définir son niveau…
    Bertrand

    • Merci à toi Bertrand !
      Tu as bien cerné l’idée du billet : faire le point sur les évolutions et permettre de tenter de comprendre où on va ! 😉
      Bonnes bulles

  3. Bonjour. Je vais tenter de décrire mon contexte et ma bien modeste perception des choses.
    Je suis un ancien plongeur, j’ai débuté en 1987 et j’ai passé jusqu’au N3 et initiateur dans les 5 ans qui ont
    suivi. A la suite de quoi je n’ai passé que le Nitrox et Nitrox confirmé durant les 24 années suivantes.

    En juin 2017, à 63 ans moins une semaine (je suis donc un ancien plongeur), j’ai passé le N4.
    Je me suis préparé physiquement pendant plus d’un an, et je reconnais que cela a été particulièrement difficile
    sur le plan physique (le pire c’est l’épreuve du mannequin). J’ai peut-être eu de la tolérance de la part du
    jury, mais comme il y avait entre autre 2 instructeurs régionaux, je pense qu’ils ne me l’auraient pas donné si
    j’avais été dangereux.

    Depuis, même si je tente de rester en bonne condition physique, je dois avouer que je ne suis pas aussi
    « pointu » que durant le N4, et donc que je ne serais pas à même de faire les mêmes performances physiques que
    celles demandées pour le N4. En en discutant avec quelques E4, ils me rassurent en indiquant qu’ils n’ont
    jamais eu à se servir des capacités physiques demandées lors de l’examen E4.
    Je traduis cela en disant que la démarche de la Fédération est d’en demander trop physiquement pour les examens N4 et suivants, afin qu’il en reste suffisamment par la suite.
    A contrario, les souvenirs que j’ai des examens N1, N2, N3 et initiateurs, sont que ces examens étaient
    « réalistes » (exemple 500 m capelé non chronométré).

    En conclusion, je pense que la problématique de ces oscillations de N4, induites notamment par le jeu aux
    limites de certaines épreuves (RSE), est lié à la démarche volontairement excessive de la fédération pour les
    brevets de niveau supérieur. Une nouvelle approche, basée sur le besoin réel et permanent pour assurer la
    fonction en toute sécurité (accord total sur la priorité à la sécurité), me semblerait être plus efficace, plus
    pérenne et plus encourageante plus les futurs candidats.

    J’espère ne pas avoir été trop long ni trop en dehors du sujet.
    Bien bulleusement, Jean-louis.

    • Merci Jean-Louis, tu n’as ni été trop long, ni hors sujet : tu exposes un point de vue argumenté !
      @Plouf

  4. Bonjour,

    Les amis du club qui préparent le N4 cette année ont eu le même genre de réflexions, surtout qu’ils avaient travaillée et acquis la RSE, et six semaines avant le stage initial où les aptitudes doivent être validées celle-ci est suspendue au profit de la DTMR que personne ne connaissait :-/

    Ce que je trouve étrange dans la description de cette nouvelle épreuve (outre le fait qu’une panne d’air se résolve miraculeusement), est qu’on y insiste explicitement sur la passivité du formateur-assisté:
    « Seul l’assistant doit intervenir pour gérer la remontée, le formateur (l’assisté) n’intervenant ni pour
    gérer son propre matériel ni pour participer en aucune manière au contrôle de la vitesse de
    remontée. Il se contente d’avoir une attitude neutre »

    … ce qui exclut l’utilisation d’une combinaison étanche pour le formateur-assisté.

    Or, rien de tel sur la description de l’intervention sur plongeur en difficulté à 40m. Ca veut dire que le formateur assisté aurait le droit d’être en combi étanche à 40m?

    • Merci NickelN8 ! la DTMR est visiblement une épreuve de « démonstration technique » sans rapport avec la réalité. Oui il n’est pas autorisé d’être en combinaison étanche à l’examen pour cette épreuve, je vais vérifier pour le reste !

  5. Bonjour Phil,
    merci beaucoup pour ton billet clair et chronologique. Je retiens ta réflexion sur le vieillissement de la population des plongeurs. Et donc des encadrants qui décrochent le E2 et le E3 de plus en plus tard, avec en corollaire un physique forcément moins affuté. Je suis arrivé dans mon club associatif en 1992. La Présidente avait 31 ans et les moniteurs entre 25 et 28 ans et encadraient tous l’été bénévolement dans les SCA. Aujourd’hui, dans le même club le Président a 59 ans et tous les encadrants plus de 45 ans, faute de réussir à motiver la jeune génération. On passe de plus en plus souvent le GP après 50 ans. Dans les sorties épaves de septembre autour de Port Cros on voit toujours majoritairement les mêmes têtes, mais de plus en plus grisonnantes (dont la mienne !).
    Motiver une nouvelle génération d’encadrants devrait être notre objectif à tous pour la pérennité de l’activité fédérale.
    Phil2

    • Merci Phil pour tes encouragements !
      J’ai démarré la plongée à 14 ans en 1978… A l’époque, c’est un sport pratiqué par des jeunes en excellente condition physique…
      J’ai fait une pause de 1984 à 2001, et j’ai passé mon N4 à 40 ans (je faisais partie des doyens de la promo)… Aujourd’hui, à pat une ou deux exceptions les quarantenaires sont le plus jeunes !
      L’époque à changé, le bénévolat est en perte de vitesse, et les « jeunes » voient l’activité comme un loisir complémentaire en vacances… Je ne sais pas trop comment réussir à motiver des jeunes.

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